Moi, la grosse -Matteo Cellini

19 juin 2015

J'ai été intriguée en recevant ce roman, par sa couverture, comme par son résumé. Je ne savais pas trop à quoi m'attendre en le commençant, et finalement, ce fut une jolie surprise. Je remercie les Presses de la Cité de m'avoir permis de lire "Moi, la grosse".

Présentation:

"« Je suis Cate-la-grosse, un obus oublié qui, depuis le collège, ne demande qu'à exploser. »

Caterina est une jeune italienne spirituelle et intelligente.
Caterina a une famille qu'elle adore.
Mais Caterina, à l'instar de ses parents et de ses frères, est grosse. Très grosse. Et ses kilos en trop l'empêchent d'exister. Selon sa conception binaire du monde – les obèses d'un côté, les « personnes » de l'autre – elle est une « non-personne ».
A peine sort-elle de chez elle qu'elle s'arme d'une carapace blindée lui permettant d'ignorer tous les commentaires, toutes les plaisanteries, dont elle pourrait être la cible. Elle anticipe tout. Pour ne pas aggraver son dossier qui pèse déjà trop lourd sur la balance, elle fait en sorte d'être la meilleure de la classe, de n'être jamais malade, jamais en retard, toujours bien habillée... bref, de ne jamais faire le moindre remous. Aussi, quand ses parents décident d'organiser une grande fête pour son dix-huitième anniversaire, c'est la panique.

Un roman, tout en sensibilité, qui voit son héroïne s'épanouir et découvrir peu à peu qu'un bonheur est possible, au-delà des apparences. "

Mon avis:

En premier lieu, j'ai été étonnée qu'un auteur masculin entre aussi bien dans la peau d'une jeune fille complexée et en mal de vivre. Matteo Cellini dépeint avec un immense talent et un phrasé souvent emprunt de poésie ce que ressent Caterina.

L'héroïne vit très mal ses kilos en trop. Lorsqu'elle est en famille, elle se sent normal, car toute sa famille est obèse; parler avec le souffle court ne surprend pas sa fratrie ni ses parents. Mais dès qu'elle sort de chez elle, elle enfile ce qu'elle appelle sa carapace de super héroïne, la Grosse. Elle tente de laisser glisser les insultes, les regards, les moqueries, se fait la plus discrète possible et se ferme à toute forme d'amitié. Pourtant, ce regard des autres sur elle l'obsède.

Au fil du récit, on voit Caterina évoluer, sombrer, s'ouvrir, se renfermer. Des scènes sont émouvantes, d'autres prêtent à sourire. De sa prof de littérature à son amie Anna, en passant par un discret garçon amoureux d'elle, on suit Caterina qui tente de se faire oublier, de se punir, avant de prendre conscience que finalement, même si ce n'est pas facile, on peut vivre en oubliant le regard des autres.

"Moi, la grosse" est un roman sur l'acceptation de soi, sur ce que l'on est, quelle que soit sa différence; car comme le souligne si justement le frère aîné de Caterina (un personnage que j'ai adoré!), de toute façon, il y a toujours quelque chose qui ne plaira pas aux gens: un nez, un profil, une bouche, une couleur de peau.

La narratrice prend peu à peu conscience qu'il ne sert à rien de se renfermer sur soi parce que l'on sort de la norme, il y a toujours des personnes qui regarderont au-delà des apparences et qui vous feront du bien.

L'auteur utilise un phrasé doux et aérien, pour conter un quotidien pourtant dur à vivre et mener ce sujet sur l'obésité, sans toutefois tomber dans les clichés. On a envie d'apaiser Caterina et de lui dire que la vie peut être chouette quand même, même si l'auteur s'en charge pour nous.

Certains personnages m'ont toutefois un peu agacée (la prof) et quelques subtilités m'ont échappé, mais j'ai beaucoup aimé ce roman qui apprend à se détacher de ce que peuvent penser les autres.

En bref, 'Moi, la grosse" est un roman qui fait un peu figure d'OVNI dans la littérature actuelle, un livre court qui se savoure, qui émeut et donne le sourire.

♥♥♥♥♥

Je le conseille: à ceux et celles qui complexent, que ce soit sur leur poids ou n'importe quelle autre "différence", bien sûr, mais aussi aux personnes qui souhaitent découvrir le talent et la plume de Matteo Cellini au service de cette histoire.